Aujourd’hui, on va vous parler de cette série injustement méconnue et replacer le contexte de sa parution chez Bragelonne au cours de l’été dernier. En reprenant cet exemple, on aimerait vous en dire un peu plus sur notre plan de reprise de certains cycles laissés à l’abandon.
Les Révélations de Riyria se composent de six romans écrits par l’américain Michael J. Sullivan. Ce dernier était au centre d’une belle histoire éditoriale, comme on n’en avait pas vu depuis Scott Lynch. Car Sullivan est quelqu’un de naturellement motivé : passionné par la lecture et l’écriture depuis son plus jeune âge, il ne comprenait pas pourquoi sa fille Sarah ne partageait pas le même amour. C’est la raison pour laquelle il s’est retroussé les manches, et a commencé à ériger les fondations d’un monde de Fantasy susceptible de réconcilier sa progéniture avec les livres.
Cet amoureux de Tolkien, Steinbeck et Hemingway donne ainsi naissance à deux personnages hauts en couleurs : le mercenaire Hadrian Blackwater et le voleur Royce Melborn, qui ont fait du danger leur fonds de commerce. Quand on leur propose la fortune servie sur un plateau d’argent, ils pensent n’en faire qu’une bouchée. Ils n’avaient pas prévu qu’on leur tendrait un piège. Les voilà accusés du pire des crimes : l’assassinat du roi ! Pour sauver leur peau, ils n’ont pas le choix. Il leur faut dénouer les fils d’un mystère qui, depuis des générations, renverse les monarques et bouscule les empires… et ce n’est là le pitch que du premier tome !
Plutôt satisfait de ses créations, cet auteur sans éditeur décide en toute logique de proposer les six romans qui composent son cycle sur Internet. Devant la qualité de ces ouvrages, plusieurs blogueurs spécialisés dans la Fantasy vantent son œuvre. Sullivan décroche même quelques nominations à des prix d’estime sur des sites importants, comme Fantasy Book Critic. Le phénomène est en marche.
Michael décide alors de tenter sa chance et fait imprimer ses livres à la demande et les vend lui-même via sa propre entreprise, créée pour l’occasion. Il réalise même les illustrations de couverture. Là encore, le public suit. Le carton n’est pas loin lorsque nos amis anglais d’Orbit Books, sur les starting-blocks, se décident à lui proposer un contrat d’édition. C’est la consécration.
Les principes d’une Fantasy quelque peu old school sont bien présents dans l’œuvre de Sullivan, mais l’auteur réussit à se jouer des clichés. Dans le même temps, ces livres vont à contre-courant de la mouvance actuelle, souvent très sombre. (Vous savez, L’Ange de la Nuit, Farlander…) Sans dire qu’ils sont lumineux pour autant, les deux héros éblouissent le lecteur par leur dynamisme et par la façon dont ils vivent leur histoire, où s’entremêlent aventures, drames et humour. Ici, il n’est pas question de monstre des temps anciens à terrasser, d’orphelin promis à un destin grandiose. Simplement de deux hommes qui se sont trouvés au mauvais endroit au mauvais moment, mais qui ne se laisseront pas faire pour autant. Débordant d’ingéniosité et de volonté, ils vont faire autant de grabuge que possible pour prouver leur innocence.
Pour toutes ces raisons, Les Révélations de Riyria, est un vrai plaisir de lecture. C’est un hommage au génie de Fritz Leiber, qui trouve tout sa place aux côtés des romans de Scott Lynch ou de Lynn Flewelling, tellement c’est amusant et facile à lire…
Si nous parlons avec enthousiasme de cette œuvre, c’est parce que nous nous sommes logiquement penché sur elle, peu après qu’Orbit UK ait annoncé l’arrivée de Riyria sous sa bannière. Aussitôt séduits, nous avons acquit les droits de la série pour la publier chez Milady, directement en poche.
Et c’est là que commence le désenchantement.
N’y allons pas par quatre chemins : les deux premières Révélations de Riyria (La Conspiration de la Couronne et La Tour elfique) n'ont pas marché. À tel point que nous avons du stopper net la publication de cette série. (Le troisième tome a néanmoins eu droit à une diffusion numérique, puisque nous avions déjà le texte traduit.)
Bref, ce fut une grande déception, d’autant que la série avait bénéficié d’un certain nombre d’efforts d’un point de vu marketing. Lorsqu’on nous posait la question par e-mail, on n’avait prit pour habitude de dire que cette édition n'avait pas rencontré le succès escompté ; ce qui est un euphémisme.
Mais l’été dernier, nous avons décidé de relancer la série.
Comme vous le savez, c’est Bragelonne qui a reprit la main, sous la forme de trois volumes en grand format, chacun d'eux réunissant deux tomes. Ainsi, nous avons publiés Les Voleurs d’épées (contenant les tomes 1 et 2 de l’édition Milady dont ont parlait plus haut) en juin. En juillet et en août sortaient respectivement L’Avènement de l’Empire (tomes 3 et 4) et L’Héritier de Novron (tomes 5 et 6). Nous avons opté pour ce découpage pour une raison très simple : c’est ainsi qu’a été diffusée la série en librairie, de l’autre côté de la Manche
Il aura donc fallu attendre deux ans pour publier l’ensemble de la série, mais nous y sommes arrivés. Les Révélations de Riyria ne se hisseront sans doute pas au niveau d’un Gemmell ou d’un Weeks, mais au moins, les lecteurs qui ont commencé leur voyage avec nos deux compères ont pu les suivre jusqu’au bout. Ce qui, en cette période des plus délicates pour le secteur de l’édition, est une belle victoire.
Nous aimerions donc remercier les personnes – dont vous faites peut-être partie – pour leur patience et leur fidélité. Cela a payé. Car constatant qu’il y avait un engouement, même minime, pour Riyria, nous n’avons jamais pensé à l’abandonner, comme cela arrive parfois, fort malheureusement.
Tout ça pour vous dire deux choses.
D’abord que, contrairement à ce que pourront dire certains, nous avons toujours été et nous resterons à votre écoute. Nous sommes trop conscients du fait que nous avons établis une certaine relation de confiance avec vous en presque 15 ans d’existence. Soyons pragmatiques une seconde : il serait terriblement bête de notre part de ne pas entendre vos doléances et réclamations. Si nous étions sourds à vos remarques, nous n’aurions pas multiplié les espaces d’expression au cours des années qui se sont écoulées : le formulaire de contact de notre site, les messages privés sur notre page Facebook, les échanges sur notre compte Twitter, etc. Il y a aussi le module de commentaires de ce blog, même si ce n’est pas le meilleur endroit pour tenir une conversation.
Même s’il est parfois difficile de vous répondre au jour le jour, on essaie de ne pas vous faire languir quelque soit l’espace. Et même si un petit nombre de messages reste sans réponse (particulièrement les demandes de partenariat, de SP ou de marques-pages), on lit tout.
Vraiment tout.
La deuxième chose qu’on souhaiterait annoncer, découle de tout ce que vous venez de lire (et on vous remercie pour votre patience) : il y aura d’autres sauvetages. D’autres œuvres en cours verront leur suite (ou leur fin) publiée, que ce soit sous une forme ou sous une autre.
Par exemple, chez Milady, malgré l’échec rencontré par Le Trône volé il y a quelques années, on relance Dragon Age, dans l’espoir que la sortie du prochain jeu (Inquisition) profite aux livres. Certaines fois, vous ne saurez même pas qu’il y a eu un quelconque problème. Parfois, il y en a même pas du tout, mais l’absence de nouveauté vous aura peut-être fait penser qu’on a tout arrêté. Regardez pourtant – toujours chez Milady – la suite de Kara Gillian, qui sort à la fin du mois. Et du côté de Bragelonne, on termine Assassini en janvier.
Ça ne veut pas dire non plus que toutes les séries qui se sont arrêtées reprendront, évidemment. Mais pour chaque situation problématique, on cherche un moyen de poursuivre l’aventure. Et je me permettrai très modestement de vous mettre au défi de trouver un autre éditeur faisant autant d’efforts… je ne dis pas qu’il n’y en a pas… je dis qu’il n’y en a pas beaucoup.
Il faut bien comprendre que ce genre d’opération demande du temps et de l’argent. C’est un investissement certain qu’on fait malgré tout pour tenir autant d’engagements que possible, alors que chacune d’elles nous en fait perdre. Du temps. Et de l’argent. Mais on gagne tous en contentement. :)
Bon… au bout de trois pages sur Word, je pense qu’il est temps de conclure. Je vais donc simplement répéter deux choses :
- Merci encore.
- On vous écoute.