Rassurez-vous, je ne vais pas vous parler de mes vacances. Cette note n’a pas non plus vocation d’encenser le film culte de Terry Gilliam. Non, là, il est question d’un roman à paraître en fin d’année chez Brage…
… mais avant, mettons-nous en situation. Nous sommes entres amis, environ un an plus tôt, chez Jean-Claude (Mallé, traducteur de Terry Goodkind, Fritz Leiber, Celia Friedman…) qui organise une soirée poker. On se détend, on apprend, on boit (du café). Bref, on se détend. Et on parle boulot (un peu).
Entre deux parties, j’aperçois un Cédric (Perdereau, traducteur de Richard Morgan, Simon Green, Scott Bakker…) très enthousiaste, conversant avec une Anne (moitié d’Ange) attentive. Je m’approche, et comprends que le gaillard évoque une lecture récente - et vu le nombre de superlatifs qu’il parsème dans son discours, une lecture qu’il a grandement apprécié.
Ce bouquin, c’est Brasyl de Ian McDonald, qui paraitra en octobre dans la collection "Bragelonne SF".
Brasyl, c’est une peu ça : quelque chose
Brasyl est un roman audacieux et surprenant, dévoilant une version... disons "tropicale", de Blade Runner. L’une de ses particularités est de proposer non pas une, mais trois histoires se déroulant dans un Brésil respectivement passé, présent et… futur. Oui, vous avez bien lu, un bouquin de SF qui s’intéresse (en partie) au passé, et plus particulièrement au XVIIIe siècle.
Chaque intrigue dispose de son personnage central : un missionnaire Jésuite envoyé par l’église pour punir un prêtre contrevenant, une ambitieuse productrice de téléréalité et un impresario de talent, qui s’est forgé une réputation à lui seul, en partant des favelas de la future São Paulo. Si chacun d'eux est le témoin de son époque, vous ne serez pas surpris d’apprendre que leurs destins respectifs sont biens liés entre eux et ce malgré le temps, l’espace et les réalités qui les séparent.
Parce que Cédric a trouvé le livre exceptionnel, et comme c'est quelqu’un de goût (sans doute pour compenser ses "compétences" aux cartes), je lui ai demandé s’il pouvait traduire en quelques mots son sentiment sur le bouquin. Il a gentiment accepté :
Quel choc ! Enfin, quels chocs, plutôt. Il ne m’avait fallu que quelques pages, la première scène en fait, pour me dire que je tenais un livre unique. La suite du livre ne m’a pas démenti. La langue telle qu’elle st écrite par McDonald est malléable, fuyante, permet tous les écarts et tous les rebonds. Elle introduit des concepts inédits dans le quotidien comme dans le spéculatif, et force le lecteur à suivre le rythme du roman sans jamais le laisser respirer. Et parlons-en, de ce rythme ! Chaque période a sa cadence, son tempo si particulier, au diapason de la vitesse à laquelle vivent les personnages. L’étrangeté de cette juxtaposition rend son utilisation d’autant plus forte, d’autant plus saisissante, et leur jonction d’autant plus déstabilisante.
Tout au long de ma lecture, j’ai ressenti de ces moments d’émerveillement, je me suis étonné de ce que McDonald parvenait à faire avec son écriture, et donc des univers ou des anomalies qu’il arrivait à créer de manière si fluide. J’ai pris un très grand plaisir à me laisser emmener, toujours certain que l’auteur savait où il m’emmenait, et que tous mes moments d’égarement étaient voulus, recherchés, pour mieux amener la suite.
En somme, j’ai été bluffé par ce roman très complexe, et pourtant d’une lecture si simple, si facile et si fluide. Arriver à servir une histoire aussi riche avec un langage trituré mais limpide est, à mes yeux, un exploit qui mérite lecture et relecture.
Voilà, ça, c’est fait. Je vois naitre la curiosité dans vos rétines et c’est tant mieux. Attendez-vous à ce qu’on vous en reparle très vite. D’ailleurs, ce sera sans doute Tom (Clegg, le directeur de Bragelonne SF) himself qui évoquera Brasyl… ainsi que des prochains ouvrages de la collection. Enfin, si vous êtes sages.